Une vie imaginaire

Quelle est la part d’imagination dans notre vie et quelle est son impact sur notre réalité ?

J’ai beau être un être cognitif, doué de raison, doté d’une intelligence pragmatique et empirique, et flanqué d’une lucidité qui impressionne son entourage, je ne peux lutter contre mon subconscient.
L’imaginaire n’est pas seulement les rêves que nous faisons éveillés ni les espoirs que nous mettons dans tel ou tel projet, il est, selon moi, avant tout, dans notre façon d’appréhender le monde qui nous entoure.
Je ne suis pas omnisciente ; par conséquent, ma connaissance est mêlée d’observations, de réflexions, d’apprentissage et … de pensées.
Le tout orienté par mon éducation, ma culture, mes expériences, mes névroses.
Ce que je vis, je ne peux le juger que par la petite fenêtre de cette connaissance, et malgré l’implacable objectivité dont je sais faire preuve sur tout ce qui m’arrive, je sais que les conclusions tirées d’une situation ne le seront que par l’idée que je m’en fais.
Si j’ajoute à cela l’influence de l’inconscient, à travers notamment les rêves, à modifier dans une plus ou moins grande mesure ma vision des événements, je me crée ma propre réalité.
Ainsi mon subconscient s’unit-il à mon analyse cartésienne.
Je dis souvent, étant une femme honnête, que je ne peux décevoir les gens que parce qu’ils ont fondé en moi des espoirs indépendants de ma volonté.
Donc si je suis déçue, est-ce parce que les autres m’ont trompée ou manipulée ou est-ce parce que je me faisais une fausse idée d’eux ? (Il est toutefois vrai que suis très rarement déçue par les gens, justement parce que je n’attends pas grand-chose d’eux. En revanche, je suis souvent en colère contre moi-même d’avoir entendu leurs promesses (et non pas cru) ou de me les être imaginées).
De même, je me suis aperçue avec un peu d’effroi en discutant avec mes compagnons, après une rupture surtout, que nous n’avons pas vécu la même histoire.
Un peu comme si l’on se persuadait (tant que tout va bien, il va sans dire) que la personne que l’on aime ressent les mêmes choses que nous, a les mêmes envies, les mêmes objectifs.
Voilà, dans la vie, nous sommes contraints, faute de savoir, de croire, d’inventer, d’imaginer.
Et heureusement, parfois !
Cependant, je me demande quel pouvoir a notre imagination.
En nous montrant le monde d’une façon personnelle et singulière, peut-elle en outre influencer nos rapports aux autres ?
Par exemple, je me demande si l’idée que nous nous faisons d’une personne ne peut pas, en plus de nous convaincre qu’elle est réellement ainsi, la pousser à le devenir, en raison notamment du comportement que nous adoptons envers elle.
Mais c’est dans la projection qu’intervient le plus notre imagination. Souvent, au moment de prendre une décision, au lieu d’être influencés par l’instinct ou le cœur, on s’imagine, n’étant pas tous devins, quel sera notre avenir et de quoi il sera fait si on prend telle ou telle voie ou si on ne bouge pas. On pèse le pour et le contre d’une chose inconnue. Et là, ce sont nos illusions (ou nos désillusions à venir) qui nous guident !
L'imaginaire, au-delà de l'imagination ou de l'invention, est ce qui fait de nos croyances une vérité.

Bref, Eric-Emmanuel Schmitt aborde ce sujet bien mieux que moi dans son dernier livre, La rêveuse d’Ostende, dans lequel 5 histoires nous suggèrent « que le rêve est la véritable trame qui constitue l’étoffe de nos jours ».


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